La Suède, autrefois pionnière dans l’intégration du numérique dans les écoles, a pris une décision inattendue : elle abandonne les tablettes pour revenir aux manuels scolaires traditionnels. Ce tournant majeur soulève des questions sur les répercussions de l’utilisation des technologies dans l’éducation et sur la manière dont elles affectent les compétences fondamentales des élèves.
Un constat alarmant : la chute des performances en lecture
Depuis plus de dix ans, les écoles suédoises avaient fait le pari des tablettes numériques pour moderniser l’enseignement. L’idée était de rendre l’apprentissage plus interactif et accessible. Pourtant, les résultats ont été loin de correspondre aux attentes. Plusieurs études récentes ont montré une chute significative des performances en lecture des élèves. En effet, le nombre d’enfants de 10 ans en difficulté de lecture a augmenté de 7 % en seulement cinq ans.
Ce recul a interpellé les autorités éducatives, qui ont rapidement identifié un lien avec la surutilisation des tablettes. Contrairement aux objectifs initiaux, les écrans n’auraient pas favorisé la concentration ou la compréhension en profondeur des textes. Les élèves, plongés dans un flux constant de distractions numériques, peineraient à maintenir leur attention sur un texte long et à en saisir la complexité.
Un retour aux livres : un investissement massif
Face à cette dérive, la Suède a décidé de faire machine arrière. Le gouvernement a investi 58 millions d’euros pour racheter des livres scolaires classiques, avec l’objectif de remettre la lecture au cœur de l’apprentissage. À partir de la rentrée, chaque élève recevra un manuel par matière, comme cela se faisait auparavant.
Ce retour aux livres marque un changement de cap significatif. L’intention est de redonner de la place à la lecture physique, à la prise de notes manuelle et à une lecture plus lente et structurée. Les enseignants seront formés pour réintégrer ces supports traditionnels dans leurs pratiques pédagogiques, après plusieurs années de dépendance aux technologies numériques.
Un débat sur l’équilibre entre tradition et modernité
Cette décision soulève un débat plus large qui concerne de nombreux pays européens : jusqu’où faut-il aller dans l’intégration du numérique à l’école ? Si les outils numériques offrent des avantages indéniables — notamment en termes d’interactivité, d’accessibilité et de personnalisation de l’apprentissage — leur usage excessif peut avoir des effets négatifs. L’expérience suédoise semble le prouver : trop de technologie peut nuire à la capacité de concentration des élèves et à leur capacité de mémorisation.
En France, la question se pose également. De nombreuses écoles ont intégré des tablettes et des outils numériques dans leurs classes, mais certains enseignants soulignent déjà les effets délétères de cette pratique : diminution de l’attention, baisse de la mémoire, et même difficultés à écrire à la main. Le retour de la Suède aux manuels traditionnels pourrait donc inspirer d’autres pays à réfléchir à l’équilibre entre innovation numérique et apprentissage classique.
Une approche plus mesurée du numérique
Le message que la Suède souhaite transmettre est clair : le numérique ne doit pas remplacer le livre, mais le compléter de manière intelligente. Il ne s’agit pas de rejeter totalement les technologies, mais de les intégrer de manière raisonnée, en veillant à ce qu’elles ne nuisent pas aux compétences fondamentales comme la lecture, la compréhension de texte et l’analyse.
En valorisant à nouveau les livres scolaires, la Suède tente de retrouver un équilibre entre la modernisation de l’enseignement et la préservation des méthodes d’apprentissage éprouvées. Ce revirement pourrait bien servir de modèle pour d’autres pays confrontés à des dilemmes similaires dans leur système éducatif.
Conclusion : un modèle pour l’avenir ?
Le retour aux manuels scolaires en Suède ne signifie pas la fin de l’innovation numérique dans les écoles, mais un appel à une utilisation plus raisonnée des technologies. En réaffirmant l’importance du livre physique et de la lecture active, la Suède redéfinit l’équilibre entre les outils numériques et les méthodes pédagogiques traditionnelles. C’est une leçon précieuse pour tous les systèmes éducatifs en quête de solutions adaptées aux défis modernes, tout en restant fidèle aux valeurs essentielles de l’enseignement.